Agent  commercial et commissionnaire et nouvelles règles de concurrence en matière de restrictions verticales  - Actualité Distribution / Concurrence / Contrats - Juillet 2022

Agent commercial et commissionnaire et nouvelles règles de concurrence en matière de restrictions verticales - Actualité Distribution / Concurrence / Contrats - Juillet 2022

Publié le : 27/07/2022 27 juillet juil. 07 2022

Les relations entre mandants et agents commerciaux ou commissionnaires ne sont traditionnellement pas appréhendées par le droit de la concurrence, sauf cas exceptionnel où ils sont considérés agir comme des opérateurs économiques indépendants. Le Règlement n° 2022/720 sur les restrictions verticales et ses Lignes directrices, entrés en vigueur le 1er juin 2022, posent de nombreuses règles distinguant le « vrai » agent du « faux » agent soumis au contrôle des ententes verticales.

Le nouveau cadre européen d’exemption des accords verticaux

Pour mémoire (voir nos actualités de mai  et juin 2022), l’article 101 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (« TFUE ») interdit en son paragraphe 1er tout accord ayant « pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché intérieur ». Cette interdiction vise les « ententes » horizontales (pratiques concertées et/ou formalisées entre concurrents opérant sur un même marché) aussi bien que verticales (entre opérateurs indépendants intervenant à différents niveaux de la même chaîne de la conception à la distribution). 

La rigueur du dispositif est toutefois modérée par plusieurs mécanismes d’exemption, fondés sur une analyse des effets positifs et négatifs de la pratique sur le marché, parmi lesquels figure le nouveau Règlement (UE) n°2022/720 concernant l’application de l’article 101 paragraphe 3 du TFUE à des catégories d’accords verticaux et ses Lignes directrices (« LD »). 

Quel est l’enjeu de l’application du droit de la concurrence aux contrats de mandataire ?


Par exception à l’applicabilité générale de l’article 101 TFUE aux accords entre entreprises, le contrat d’agence commerciale ne relève pas de l’article 101, paragraphe 1, car l’agent n’agit pas en tant qu’opérateur économique indépendant du mandant mais pour le compte et au nom de ce dernier. Il est de même pour le commissionnaire à la vente qui agit à l’égard des tiers en son nom mais pour le compte de son commettant (§29 LD). Ainsi, leur accord échappe au droit des ententes et le mandant peut par exemple imposer à son agent le respect strict de ses tarifs et conditions générales de vente, ou limiter son territoire et ses clients (§41 LD).

Cependant, encore faut-il qu’il s’agisse d’un « vrai » contrat d’agence. 

Comment distinguer un « vrai » agent d’un « faux » ?

La qualification d’agent commercial ou de commissionnaire en vue de l’application de l’article 101 TFUE n’est traitée que dans les seules Lignes directrices (§29 à 46 LD). Un « vrai » agent (ce terme couvrant aussi dans les LD le commissionnaire) n’assume (§31 LD) ni les risques propres à chaque contrat conclu avec des clients, ni ceux liés aux investissements propres au marché ni enfin ceux liés à d'autres activités menées sur le même marché de produits.

Il en est de même si l’agent n’assume qu’une partie négligeable de ces risques (§32 LD).

En revanche, les risques attachés aux prestations de l’agent en général demeurent non pertinents pour cette appréciation, tels que le risque que ses commissions soient subordonnées à sa réussite en tant qu’agent ou ses investissements généraux (dans un local ou du personnel) (§32 LD).

Les nouvelles Lignes directrices ajoutent que l’importance de ces risques doit généralement être appréciée sur la base de la rémunération de l’agent et non sur la base des recettes générées par la vente des biens ou services couverts par le contrat d’agence.

Les Lignes directrices posent une liste non exhaustive (§33 LD) des risques et coûts qu’un « vrai » agent ne doit pas supporter. Ces risques et coûts sont par exemple : acquérir la propriété des biens achetés ou vendus en vertu du contrat d’agence ; contribuer aux coûts liés à la fourniture ou à l’achat des biens ou des services contractuels ; tenir à ses propres frais ou risques, des stocks de biens contractuels ; assumer la responsabilité vis-à-vis des clients ou d’autres tiers pour les pertes ou dommages résultant de la fourniture des biens ou des services contractuels ; être obligé d’investir dans des actions de promotion des ventes, dans des équipements, des locaux, de la formation du personnel ou de la publicité, sauf si ces coûts lui sont remboursés par le mandant.

Comment le mandant peut-il couvrir les coûts et risques de l’agent ?

Un mandant peut couvrir les risques et les coûts supportés par son agent de sorte que l’agent ne supporte aucun risque important. Ainsi, un mandant peut choisir de (i) rembourser les coûts exacts supportés, (ii) payer une somme forfaitaire fixe, ou (iii) verser un pourcentage fixe des recettes générées par la vente de biens ou services (§35 LD). 

Le mandant doit donc porter une attention particulière à la fixation des charges supportées par l’agent et, si tel est le cas, aux modalités financières couvrant les charges.

Quels sont les autres cas d’application du droit de la concurrence ?

Mais même dans le cas où l’agent ne supporterait aucun risque, le contrat d’agence peut toujours relever de l’article 101 TFUE s’il facilite la collusion. Par exemple, si un certain nombre de mandants font appel aux mêmes agents et empêchent collectivement d'autres mandants de recourir à ces mêmes agents ou se servent de ces agents pour s'entendre sur une stratégie commerciale ou pour s'échanger des informations sensibles sur le marché (§44 LD).

Comment cumuler agent et distributeur ?

Un distributeur peut agir comme agent à l’égard de son fournisseur pour d’autres de ses biens ou services, pour autant que les activités et risques couverts par le contrat d’agence sont effectivement distingués (§36 LD). Les nouvelles Lignes directrices fournissent des exemples sur la manière de répartir les coûts entre les deux activités (§39, 40 LD). Mais dans la réalité, les fournisseurs devront être très prudents s’ils envisagent de confier un cumul d’activités à leur partenaire.

Quelle sanction en cas de qualification de « faux » agent ?

Les accords avec de « faux » agents relèvent de l’article 101 TFUE. Ils peuvent toujours bénéficier d’une exemption par catégorie, sauf s’ils stipulent une restriction caractérisée comme, par exemple, l’imposition de prix de revente, ce qui sera le cas lorsque le « faux » agent (considéré comme indépendant) sera obligé d’appliquer les tarifs de son mandant. De même, le contrat de « faux » agent devra respecter les règles encadrant les restrictions territoriales. 

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